La voie lactée du lactose

Qu’est-ce que le lactose et comment affecte-t-il notre corps ?

Les bi­en­faits du lac­tose sont im­pres­sion­nants : non con­tent de don­ner à notre corps un re­gain d’én­ergie in­stan­ta­né, il aide aus­si à ab­sorber le cal­ci­um, le zinc et le cuiv­re, op­ti­mise la crois­sance os­seuse et con­tribue au bon fonc­tion­nement du cerveau et du sys­tème im­mu­ni­taire. Le su­cre de lait est une source durable d’un glu­cide plus pe­tit ap­pelé glu­cose qui est stocké dans les mus­cles pour être util­isé comme car­bu­rant, en par­ti­c­uli­er pen­dant les en­traîne­ments in­tens­es. Il joue donc un rôle im­por­tant dans le régime al­i­men­taire des ath­lètes, les aidant à récupér­er après l’ex­er­ci­ce et à se pré­par­er pour la prochaine ac­tiv­ité. Les sportifs qui ne con­som­ment pas suff­isam­ment de glu­cides éprou­vent sou­vent de la fa­tigue et des douleurs mus­cu­laires.

Et qui pour­rait nier l’util­ité des car­ac­téris­tiques physi­co-chim­iques du lac­tose ? Son goût an­odin et sa faible hy­gro­scop­ic­ité en font un ex­cel­lent agent de rem­plis­sage et de di­lu­tion pour les pilules, les gélules et les pré­pa­ra­tions pour nour­ris­sons. Sa ca­pac­ité à trans­porter des arômes et des couleurs of­fre des pos­si­bil­ités uniques aux con­fiseurs : ils ajoutent sou­vent du lac­tose aux nap­pages, aux glaçages et dans les tartes aux fruits pour aug­menter le to­tal des solides et am­pli­fi­er les saveurs. C’est en­core le lac­tose que les am­a­teurs de bois­sons lac­tées peu­vent féliciter pour le goût si velouté et onctueux qu’il con­fère à leur bois­son préférée !

Au­jourd’hui, plusieurs mil­lions de tonnes de lac­tose sont pro­duites dans le monde, à par­tir de lait de vache ou de sous-pro­duit du lac­tosérum. Le lac­tosérum, ou pe­tit-lait, est un liq­uide trou­ble com­posé d’eau, de su­cre de lait, de pro­téines, de vi­ta­mines et de minéraux. Il ap­pa­raît après la co­ag­u­la­tion du lait et sa fil­tra­tion : lors de la fab­ri­ca­tion du fro­mage, par ex­em­ple, le cail­lé solide est sé­paré du pe­tit-lait liq­uide. Bien que le lac­tose n’ait été re­con­nu com­mer­ciale­ment que dans les an­nées 1960, sa pro­duc­tion in­dus­trielle n’a pas changé de manière sig­ni­fica­tive par rap­port à la méth­ode d’isole­ment d’orig­ine de sa fab­ri­ca­tion.

La longue aven­ture de la dé­cou­verte du lac­tose : Qu’est-ce que le lac­tose (C₁₂H₂₂O₁₁) ?

D’après les sci­en­tifiques qui se sont penchés sur l’his­toire du lac­tose, celui-ci au­rait été men­tion­né pour la pre­mière fois au XVIᵉ siè­cle. Cer­tains at­tribuent la toute pre­mière dé­cou­verte du lac­tose à Leon­hard Thur­neysser (1531–1596), célèbre sa­vant, guéris­seur et alchimiste ! Il ser­vait à la cour de l’électeur John George de Bran­de­bourg. Thur­neysser est celui qui a mis en év­i­dence le lac­tose dans le lac­tosérum. À cette époque, per­son­ne ne con­nais­sait les pro­priétés re­mar­quables de cette sub­stance. Véri­ta­ble pas­sion­né d’ex­péri­men­ta­tion, Thur­neysser veut voir ce qui se passe quand on chauffe le lac­tose. Il laisse donc frémir le liq­uide dans un tube à es­sai, jusqu’à ce que la dernière goutte d’eau se soit éva­porée. Puis, voy­ant que le tube n’est pas vide, Thur­neysser re­garde de plus près et ob­serve de pe­tits cristaux blancs à l’in­térieur du tube. Il nomme les cristaux « un sel clé du lait », puis délaisse rapi­de­ment sa dé­cou­verte. Ob­sédé par la recherche de remèdes mir­a­cles, il avait prob­a­ble­ment trou­vé une nou­velle herbe médic­i­nale à ex­péri­menter, ou il était tout sim­ple­ment trop oc­cupé à faire face aux ac­cu­sa­tions soudaines de char­la­tanisme !

Leonhard Thurneysser []

Ain­si, per­son­ne n’a vrai­ment prêté at­ten­tion à cette dé­cou­verte du lac­tose et le com­posé doit en­core at­ten­dre sa re­con­nais­sance – à dé­faut de son heure de gloire – ou du moins que quelqu’un daigne le renom­mer : cest vrai que le terme « sel » n’était pas adap­té à la na­ture su­crée du com­posé… Puis, en 1619, le médecin ital­ien Fab­rizio Bar­to­let­ti (1576–1630) re­pro­duit l’ex­péri­ence de Thur­neysser et bap­tise ces cristaux « manne », en référence à la nour­ri­t­ure tombée du ciel dans la Bible. Ce nom était certes poé­tique, mais pas plus su­cré…

Pen­dant deux siè­cles, voy­ageant de manière aven­tureuse d’un tube à un autre, le lac­tose s’est vu af­fublé de noms in­cer­tains, dont au­cun n’ar­rivait à révéler sa vo­ca­tion. Ce n’est qu’en 1780 que le chimiste ger­mano-sué­dois Carl Wil­helm Scheele (1742–1786) a fait une per­cée ré­sol­u­ment su­crée en iden­ti­fi­ant le lac­tose comme étant un su­cre. Puis, en 1843, le chimiste français Jean-Bap­tiste Du­mas (1800–1884) at­tribua à ce su­cre le nom de « lac­tose », du latin « lac », qui sig­ni­fie « lait », auquel on ajou­ta le suf­fixe -ose, util­isé pour nom­mer les su­cres. Quoi de plus pré­cis pour ces cristaux blancs au goût doux et su­cré ?

Cristaux de lactose []

Sous le mi­cro­scope, ces cristaux ressem­blent da­van­tage à de pe­tits tom­a­hawks (la hache de guerre des Nord-Amérin­di­ens) qu’à des bon­bons. La molécule de lac­tose (342,2 g/mol) représente deux su­cres in­dépen­dants. Ce sont des var­iétés de galac­tose et de glu­cose, liées en­tre elles par un atome d’oxygène.

Le galactose et le glucose []

Fait in­téres­sant : ces su­cres sim­ples ont la même for­mule (C₆H₁₂O₆) et la même masse mo­laire (180,156 g/mol) – mais ils présen­tent une dis­po­si­tion légère­ment dif­férente de leurs atom­es. En rai­son de cette dif­férence, le galac­tose a un point de fu­sion plus élevé, tan­dis que le glu­cose a un goût plus su­cré. Comme les deux com­posés sont con­sti­tués d’une seule molécule de su­cre, on les ap­pelle « monosac­cha­rides ». Le lac­tose qui com­porte ces deux su­cres dans sa com­po­si­tion ap­par­tient, quant à lui, à la classe des dis­ac­cha­rides.

Le glu­cose four­nit l’én­ergie néce­saire aux or­ganes du corps, tan­dis que le galac­tose op­ti­mise le fonc­tion­nement du sys­tème im­mu­ni­taire et du cerveau. Cepen­dant il faut beau­coup d’ef­fort pour at­tir­er ces su­cres hors du lac­tose et les faire tra­vailler au béné­fice du corps hu­main. Générale­ment, ce pro­ces­sus né­ces­site deux com­posants – l’eau et la lac­tase. C’est vrai : « lac­tase » et « lac­tose » ne dif­fèrent que d’une seule let­tre ! Mais con­traire­ment au galac­tose et au glu­cose, ils ont des car­ac­téris­tiques com­plète­ment dif­férentes. Jetez un coup d’œil aux por­traits chim­iques du lac­tose et de la lac­tase pour voir si c’est vrai.

Le lactose et la lactase []

Tout d’abord, la lac­tase n’est pas un su­cre – c’est une en­zyme di­ges­tive qui est na­turelle­ment pro­duite par les cel­lules et les bac­téries de l’in­testin grêle. Les in­struc­tions pour fab­ri­quer de la lac­tase se trou­vent dans notre ADN, avec le gène LCT. Lorsque le gène LCT est « ac­tivé », l’en­zyme peut être pro­duite dans la cel­lule. En­suite, l’en­zyme est li­bre de digér­er le lac­tose.

Com­ment agit la lac­tase ?

Théorique­ment, lorsque vous bu­vez du lait, l’eau af­fronte le lac­tose en at­taquant sa li­ai­son galac­tose-glu­cose : elle ajoute un oxygène et un hy­drogène au galac­tose et un hy­drogène au glu­cose. L’is­sue de ce com­bat est prévis­i­ble : le su­cre de lait est di­visé en deux su­cres plus sim­ples, le galac­tose et le glu­cose.

L’hydrolyse du lactose en D-galactose et D-glucose []

Cette réac­tion est ap­pelée hy­drol­yse, ce qui sig­ni­fie sim­ple­ment « frac­tion­nement avec de l’eau ». Mais sans l’aide de la lac­tase, celle-ci se déroulerait très lente­ment et le corps hu­main ne serait pas en mesure d’ab­sorber le lac­tose au mo­ment où il at­teindrait le gros in­testin.

Presque tous les bébés hu­mains ont suff­isam­ment de lac­tase dans leur corps pour dé­com­pos­er le lac­tose. C’est même le lac­tose qui four­nit en­v­i­ron 50 % de leur én­ergie to­tale ! En gran­dis­sant, le gène LCT de­vient moins ac­t­if et, sou­vent, s’éteint. Vient le jour où, in­con­scient de ce change­ment, un adulte dé­cide de s’of­frir une crème glacée ou une part de cheese­cake et ressent soudaine­ment un in­con­fort… L’ab­sence de lac­tase dans son corps fait s’ac­cu­muler du lac­tose dans ses in­testins, où les bac­téries in­testi­nales le man­gent, pro­duisant alors des gaz, des bal­lon­nements, des maux d’es­tom­ac, la di­ar­rhée et d’autres symp­tômes désagréables.

Éton­nam­ment, seule­ment en­v­i­ron 35 pour cent des adultes dans le monde peu­vent prof­iter pleine­ment des pro­duits laitiers, tan­dis que les autres per­dent la ca­pac­ité de pro­duire de la lac­tase et de­vi­en­nent in­tolérants au lac­tose.

Il y a aus­si quelque chose de frap­pant dans la géo­gra­phie de la lac­tase. Ap­parem­ment, les habi­tants du nord de l’Eu­rope et ceux de cer­taines tribus africaines pro­duisent beau­coup de lac­tase, même après l’âge adulte. En en­quê­tant sur dif­férents groupes eth­niques, les sci­en­tifiques ont pu lier cette ca­pac­ité au fait que ces pop­u­la­tions chanceuses él­e­vaient tra­di­tion­nelle­ment des trou­peaux de vach­es et d’autres an­i­maux laitiers !

En quoi les laits des dif­férents mam­ifères dif­fèrent-ils ?

Peut-être que les sci­en­tifiques du Smith­so­ni­an’s Na­tion­al Zoo de Wash­ing­ton, D.C. peu­vent nous aider à trou­ver la réponse. Ce zoo pos­sède la plus grande col­lec­tion d’échan­til­lons de lait au monde. Les sci­en­tifiques, qui étu­di­ent plus de 16 000 var­iétés de lait pro­duites à par­tir de plus de 200 es­pèces de mam­mifères, af­fir­ment que les tubes éti­quetés « hip­popotame », « go­rille » et « éléphant d’Afrique » ont beau avoir une couleur sim­i­laire, ils ont des niveaux très dif­férents de lipi­des, de pro­téines, de minéraux et, bien sûr, de lac­tose. Le su­cre de lait représente en­v­i­ron 1 à 8 % des solides du lait de mam­mifère. Or plus le lait est gras, moins il con­tient de lac­tose. Ain­si, avec 4,2 % de matières grass­es, le lait mater­nel hu­main con­tient 7,2 % de lac­tose, tan­dis que le lait de phoque à ca­pu­chon con­tient 61 % de matières grass­es et pas du tout de lac­tose ! Ce con­traste mon­tre que les dif­férentes es­pèces ont des be­soins dif­férents pour sur­vivre dans leur en­vi­ron­nement. Les sci­en­tifiques pour­suiv­ent leurs recherch­es pour dé­cou­vrir de nou­velles façons de sauver les es­pèces men­acées et égale­ment pour étudi­er la façon dont le lait hu­main a évolué.

Vous savez cer­taine­ment que le lait est l’une des meilleures sources de cal­ci­um. Et ses pro­duits dérivés comme les yaourts et les fro­mages sont bons pour vos os, vos mus­cles et vos nerfs… Cepen­dant, que faire si vous aimez le lait, mais que vous ne sup­port­ez pas le lac­tose ? Du yaourt sans lac­tose, ce n’est quand même pas pareil… Voici la bonne nou­velle : l’in­tolérance au lac­tose n’est pas mortelle. Con­traire­ment à une al­lergie au lait, où le corps s’at­taque lui-même lorsqu’il ren­con­tre un al­i­ment con­tenant des pro­téines de lait, l’in­tolérance au lac­tose peut être gérée. Bien que les al­i­ments à faible teneur en lac­tose ou sans lac­tose soient une bonne op­tion, cer­tains change­ments de régime peu­vent vous per­me­t­tre de con­tin­uer à manger et à boire de vrais pro­duits laitiers ! Cela vaut donc la peine d’ap­pren­dre quels al­i­ments votre corps peut ou ne peut pas tolér­er. Le lac­tose se dis­sout facile­ment dans l’eau, mais beau­coup plus dif­fi­cile­ment dans les graiss­es. Ain­si, même si le lait en­tier peut être dif­fi­cile à digér­er, un morceau de fro­mage dans votre sand­wich ou un yaourt avec des fruits frais est moins sus­cep­ti­ble de caus­er des symp­tômes désagréables. Cer­tains diététi­tiens recom­man­dent égale­ment de pren­dre des gouttes ou des gélules d’en­zyme lac­tase avant de con­som­mer des al­i­ments con­tenant du lac­tose.

C’est en suiv­ant un régime al­i­men­taire équili­bré et en le per­fec­tion­nant selon vos be­soins, que le lac­tose peut de­venir un su­cre am­i­cal !

Sources :

  1. MOL­E­CULES OF TASTE - LAC­TOSE
  2. In the foot­steps of my lac­tose-in­tol­er­ant an­ces­tors
  3. In­side the world's largest col­lec­tion of an­i­mal milk
  4. USES OF LAC­TOSE
  5. Lac­tose
  6. Liv­ing with lac­tose in­tol­er­ance
  7. The sur­pris­ing links be­tween hu­man milk and the wild
  8. Lac­tose In­tol­er­ant Peo­ple May Soon Be Able to Eat "Real" Ice Cream Again
  9. What is the func­tion of lac­tose?
  10. What Are the Func­tions of a Hy­drol­y­sis Re­ac­tion in Bi­ol­o­gy?
  11. Lac­tose
  12. Химические свойства молока. Лактоза — Академия занимательных наук
  13. Ev­ery­thing about in­dus­tri­al lac­tose pow­der
  14. Sug­ar ex­plained
  15. Dif­fer­ence Be­tween Monosac­cha­rides Dis­ac­cha­rides and Polysac­cha­rides
  16. Lac­tose Some ba­sic prop­er­ties and char­ac­ter­is­tics
  17. Phys­i­cal and Chem­i­cal Prop­er­ties of Lac­tose
  18. Changes Dur­ing Lac­ta­tion In The Com­po­si­tion Of The Milk Of The African Black Rhi­noc­er­os
  19. Lac­tose: Prop­er­ties and Uses
  20. LCT gene
  21. What Are the Func­tions of Lac­tose?
  22. The Sci­ence Be­hind Lac­tose In­tol­er­ance
  23. 3 Rea­sons why Lac­tose is good for you
  24. Lac­tose in Phar­ma­ceu­ti­cal Ap­pli­ca­tions
  25. Lac­tose
  26. Lac­tose In­tol­er­ance
  27. Sev­en of the Most Ex­treme Milks in the An­i­mal King­dom
  28. Milk
  29. Life­style changes to make if you’re lac­tose in­tol­er­ant
  30. Sources of the Lac­tase En­zyme
  31. Молочный сахар
  32. Why lac­tose in­tol­er­ant peo­ple DGAF about avoid­ing cheese
  33. A FEW FACTS ABOUT LAC­TOSE
  34. Milk as a Sports Drink
  35. 33 Celebs Re­veal What They Eat on Their Cheat Days